Quand grand mère Philomène n’était pas sage …

En travaillant sur ma lignée patronymique, pour préparer encore et toujours ma semaine à Aix en Provence, je viens de découvrir coup sur coup trois documents qui m’ont un peu perturbé. Travailler sur sa famille proche dans le temps, ici les grands parents de mon père, est plus chargé au niveau de l’émotion que travailler sur la génération 10.

Tout d’abord, voici de qui je parle

billard_burgos

Avant de trouver les documents en question, j’avais collecté et validé les informations suivantes  :

  1. Jean Joseph Billard est né dans l’Aude en 1873
  2. Philomène Blanco est née en Algérie en 1869
  3. En 1896, Jean Joseph épouse Philomène à Alger
  4. En 1905, leur fils Gaston nait à Béziers
  5. En 1919, Jean Joseph et Philomène divorcent, par jugement du tribunal de Béziers

Quelques recherches plus tard – en fait, un bon paquet d’heures de recherches plus tard, plus deux lignes de vie, plus l’épluchage des recensements de Béziers de 1896, 1901,1906 et 1911 – ma vision un peu simpliste de la famille de mon grand père a nettement changé.

Ma première découverte, je l’ai faite en lançant une recherche sur Geneanet, sur le patronyme Billard. J’avais souvent lancé la requête, pourquoi ai je vu cette fois une information que j’avais ratée ? Surtout sur l’arbre d’une cousine, descendante d’une soeur de Philomène, retrouvée sur Geneanet dans les tous débuts de mon inscription ?

Mon contact mentionnait un enfant de Jean Joseph et Philomène, Henri Joseph Billard, né à Alger le 26 juillet 1896,  et mort à 5 semaines, le 4 septembre 1896.

Vérification sur le site des ANOM, Henri Joseph était déclaré et reconnu par son père Jean Joseph.

ANOM Naissances Alger 1896 - Acte de naissance de henri Joseph Billard
ANOM Naissances Alger 1896 – Acte de naissance de henri Joseph Billard

 

Une fois passée la « surprise » de voir que Philomène et Jean Joseph avaient fêté Pâques avant les Rameaux, cette naissance me donnait une indication sur l’arrivée de Jean Joseph en Algérie, une de mes nombreuses questions en suspens. Mathématiquement, il vivait à Alger depuis au moins octobre ou novembre 1895. Le fait qu’il soit mentionné comme demeurant à Béziers avec ses parents lors du recensement de 1896 ne doit pas nous perturber.

 

Notice recensement 1896 - AD86
Notice recensement 1896 – AD86

 

Jean Joseph était donc considéré par ses parents comme en voyage pour raisons d’affaires … Rappelons que le recensement est fait sur déclaration des recensés, et on dit bien ce qu’on veut .

La seconde découverte, je l’ai faite dans la foulée. Je ne me souvenais pas si j’avais fait des recherches sur des naissances avec le patronyme Blanco à Alger. Et comme le site des Archives Nationales d’Outre Mer a indexé les registres d’état civil d’Algérie – quel confort … – j’ai lancé ma requête …. et récupéré une nouvelle information encore plus perturbante.

 

ANOM - Registre des décès 1895 - Sans vie Blanco
ANOM – Registre des décès 1895 – Sans vie Blanco

 

Philomène a donc eu un premier fils, mort né vers 8 mois, né de père inconnu en mai 1895. Puis vers octobre 1895, elle tombe à nouveau enceinte, toujours sans être mariée, et cette fois Jean Joseph reconnait l’enfant et obtient de ses parents, demeurant à Béziers, l’autorisation d’épouser la mère de son fils.

Ce bébé mort né de père inconnu, je sais que je n’en aurai probablement jamais la preuve, mais je suis convaincue qu’il est aussi de Jean Joseph. J’ai du mal à imaginer qu’à peine remise de la naissance d’un bébé mort né, Philomène ait « fricoté » avec un autre homme juste débarqué à Alger et se soit à nouveau retrouvée enceinte.

Si mon hypothèse est exacte, Jean Joseph aurait donc quitté Béziers au plus tard en octobre 1894, juste après ses 21 ans …. Tiens donc …. Je retrouve là une certaine logique puisque la chronique familiale voulait qu’il ait quitté la métropole après une dispute avec son père. Il a probablement quitté Béziers à sa majorité. Si je mets la main sur les listes de passagers des bateaux arrivés à Alger en octobre 1894, j’y trouverai peut être son nom, et la preuve de son arrivée.

Je n’ai pas retrouvé de naissance d’autre enfant entre Henri Joseph en 1896 et mon grand père Gaston en 1905, et cela m’interpelle.

En 1906, je retrouve Jean Joseph à Béziers, il vit avec son épouse Philomène et son fils Gaston au 31 avenue des Casernes, actuellement avenue de la Marne, là même où est né Gaston. Pas d’autre enfant dans le recensement, Gaston semble donc bien être leur seul enfant survivant.

Je vous ai déjà raconté comment j’ai trouvé qu’en septembre 1907, Philomène et Gaston ont quitté Béziers pour Bourbaki, probablement seuls …

Ma dernière découverte est encore plus fraiche, et elle m’a un tantinet irritée.

Dans le recensement 1911 de Béziers, j’ai trouvé l’information suivante :

billard_1901_census

 

En 1911, Jean Joseph vit à Béziers, villa des Pervenches dans le quartier de l’Hôtel Dieu. Il déclare vivre avec son épouse, Caroline, née à Réalmont en 1883, et son fils Georges, né à Béziers en 1906….. Quoi ? Pardon ?

Caroline, je la connais, Jean Joseph va l’épouser le 7 avril 1928 à Béziers. Entretemps, en 1919, il a divorcé de Philomène. Là, on est en 1911, et il est toujours officiellement marié à Philomène. Quant à Caroline Paulin, elle est en théorie mariée à Vincent Léon, qu’elle a épousée le 16 février 1901 à Realmont dans le Tarn. Quand à ce petit Georges – mon grand oncle sorti de nulle part – s’il est né à Béziers en 1906, alors il est né alors que Philomène habitait encore avec son époux légitime à Béziers ….. Ca fait vaudeville à la Feydeau, mais je n’ai pas totalement envie de rire.

Il va falloir que j’ajoute l’Hérault à ma liste de voyages généalogiques, ou que les archives de l’Hérault mettent en ligne une décennie supplémentaire, pour que je démêle ces nouveaux écheveaux.

Mais cette première plongée dans la vie de Philomène, mon arrière grand mère, et dans l’enfance de Gaston, mon grand père, mort le jour de mon premier anniversaire, me touche. J’ai souvent entendu dire que mon grand père était un homme assez dur, et en découvrant quelle fut son enfance, je commence à mieux comprendre l’adulte qu’il fut.
[Philomène Blanco – Sosa 25]

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